Les enjeux financiers qui touchent les ados 2ELGBTQI+

Saviez-vous que le fait d’être queer peut entraîner un coût financier ? Voici six enjeux financiers dont les ados 2ELGBTQI+ devraient être informés.
Par Keph Senett · 8 janvier 2025 · 14 minutes de lecture
Smiling group of LGBTQ teens

C’est le mois de la Fierté au Canada, ce qui signifie que tout le monde parle de diversité – et c’est quelque chose qui mérite d’être célébré. Mais c’est aussi l’occasion de réfléchir à la situation unique des enfants et ados 2ELGBTQI+* et de penser à des moyens d’améliorer ce qu’ils vivent. Que nous ayons ou non envie d’en parler, cela intègre des aspects financiers, et c’est pourquoi nous allons explorer six aspects financiers importants pour les jeunes queers et les jeunes trans.

Six questions d’argent pour les jeunes 2ELGBTQI+

Que ce soit dans leur vie à la maison, à l’école ou au travail, les jeunes queers ou trans peuvent rencontrer certaines difficultés particulières susceptibles de menacer leur sécurité financière – or la stabilité économique a une incidence sur le bien-être général. Apprenez-en plus sur ces six questions, afin de pouvoir vous préparer à profiter pleinement de la vie.

Teen girl sitting on stairs at school with arms folded, head lowered.

1. Coûts de soutien en santé mentale

L’adolescence est un âge où l’on subit beaucoup de pression. La vie à la maison, l’école et les questionnements sur l’avenir envahissent l’esprit et nécessitent des capacités d’adaptation assez développées. Les choses peuvent être encore plus difficiles si vous êtes 2ELGBTQI+, car vous pouvez en plus faire l’objet de discrimination ou de stigmatisation, voire de violences ou d’abus – autant de choses susceptibles d’avoir un effet négatif sur votre santé mentale.

Selon l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM), les jeunes 2ELGBTQI+ ont plus de chances que leurs homologues hétérosexuels de connaître des problèmes de santé mentale, tels la dépression et l’anxiété, l’abus de substances ou la suicidabilité – 14 fois plus, pour être exact, les jeunes trans et les personnes ayant subi des agressions physiques ou sexuelles étant les plus à risque.

Une grande part de cet écart peut être associée à la hausse des niveaux de violence, de stigmatisation et de discrimination auxquels font face les jeunes 2ELGBTQI+ ; parallèlement à cela, l’ACSM relève que l’inclusion sociale, ou la communauté, et la stabilité économique sont des éléments essentiels d’un bon équilibre mental. Nous y reviendrons plus loin.

Il peut être problématique pour des ados queers ou trans d’avoir accès, s’il y a lieu, à des thérapies ou à des médications abordables. Même si certains thérapeutes facturent leurs services selon un tarif dégressif, le coût moyen d’une séance de 60 minutes tourne autour de 150 $ au Canada. S’il existe dans certaines grandes villes des services à la jeunesse, des groupes ou des événements s’adressant aux jeunes 2ELGBTQI+, comme Supporting Our Youth (SOY) à Toronto, il est aussi possible de trouver du soutien sans frais en ligne ou par téléphone si l’on se trouve dans des endroits plus petits ou plus éloignés, grâce à des services de conseil par des pairs comme Trans LifelineYouthline, ou Anonymous Friend.

J’aurais aimé savoir…

« Il m’a fallu longtemps pour assumer mon identité queer, en partie parce que je ne savais même pas que c’était possible. J’ai grandi dans une famille et un système scolaire où les identités queer et trans n’étaient même pas évoquées. Ce n’est qu’à l’université que j’ai pris conscience qu’il me manquait depuis des années une immense partie de mon identité, et même là, il m’a fallu encore plus longtemps pour ne plus avoir de complexes et devenir vraiment à l’aise avec cette partie de moi-même.

Si la thérapie m’a énormément aidée, en me permettant de reconnaître et d’aimer ma nature queer, le coût a longtemps été dissuasif pour moi. Engager un thérapeute, surtout un thérapeute pouvant avoir une connaissance spécialisée des questions d’identité et des traumatismes propres aux queers, peut vite coûter cher, mais cela a également été vraiment crucial pour ma guérison. Je rêve d’un monde où la thérapie serait accessible immédiatement et sans frais à tout le monde et où l’on célébrerait le fait d’être queer ! »Julianna Notten (elle/elles), réalisatrice de Erin’s Guide to Kissing Girls

2. Des dettes d’études supplémentaires

Le collège ou l’université constituent une étape importante – et coûteuse – dans la vie des jeunes et, à moins d’avoir accès à un fonds d’études, il faut trouver un moyen de payer ses frais de scolarité et ses dépenses. De nombreux jeunes sont dès lors contraints de trouver un travail à temps partiel, d’obtenir une bourse d’études ou de souscrire un prêt étudiant.

Certains étudiants réduisent leurs coûts en restant chez leurs parents, mais cela peut ne pas être une option sûre ou viable s’ils sont 2ELGBTQI+. Certains parents ou tuteurs voient encore d’un mauvais œil les personnes queers ou trans et refusent de garder leurs enfants à la maison après qu’ils ont révélé leur identité de genre. Il est difficile de mesurer exactement le nombre de jeunes queers ou trans qui ont perdu leur toit après leur révélation, mais on sait avec certitude qu’entre 25 et 40 % des jeunes sans-logis au Canada se définissent comme 2ELGBTQI+.

Pour ces jeunes qui ont été mis à la porte, le coût des études collégiales ou universitaires est beaucoup plus élevé, car ils doivent assumer leur loyer, le coût des services publics, leur alimentation et leurs autres dépenses. Il devient alors souvent nécessaire de prendre un ou plusieurs prêts étudiants, mais le remboursement de ces prêts peut véritablement entamer leur budget à long terme. Le montant des versements dépend de la taille du prêt, mais il n’est pas rare de devoir payer plusieurs centaines de dollars par mois, ce qui est lourd pour quelqu’un qui commence dans la vie active. Beaucoup sont dans l’impossibilité d’économiser pour l’achat d’un logement ou pour la retraite tant que leur dette d’études n’est pas remboursée, ce qui peut les priver d’années de composition des intérêts.

Il est possible de réduire les montants à emprunter en demandant des bourses d’études ou des subventions, qui sont autant de ressources financières qu’il n’est pas nécessaire de rembourser. Certaines bourses d’études sont fondées sur les résultats universitaires, tandis que d’autres bourses et les subventions tiennent également compte des besoins financiers de l’étudiant. Le bureau d’aide financière de votre établissement d’enseignement saura vous renseigner à ce sujet ; vous trouverez également une liste des bourses d’études accordées aux étudiants 2ELGBTQI+ sur le site de Scholarships Canada (en anglais). 

Queer male teen dressed in green top, large earrings, wearing makeup

3. Les ados queers peuvent avoir à payer plus cher pour mener une « double vie »

Les enfants qui ne se sentent pas acceptés par leurs parents ou par leurs pairs peuvent essayer de s’adapter en menant une « double vie ». Par exemple, certains peuvent se sentir à l’aise d’être eux-mêmes à l’école, mais avoir l’impression de devoir s’habiller ou se présenter en personnes hétérosexuelles à la maison pour plaire à leurs parents.

Avoir une garde-robe peut coûter cher. Imaginez deux. Par ailleurs, ce type de comportement peut vraiment avoir des conséquences sur la santé mentale d’une jeune personne.

J’aurais aimé savoir…« En grandissant, j’avais vraiment peur que mes parents et les autres enfants à l’école découvrent que j’étais gai, ou que j’étais encore en train de le découvrir. La seule chose que je voulais, c’est qu’ils pensent que j’étais hétérosexuel.

À l’école secondaire, j’achetais des choses que je n’aurais jamais pensé acheter : les souliers de sport les plus récents ou des vêtements projetant une image plus masculine ; certains jours je n’emballais même pas mon dîner, parce que le fait d’acheter mon repas faisait plus masculin devant les autres à l’école.

Avec les années, il est devenu de plus en plus coûteux de cacher qui j’étais. Avoir des vêtements de rechange pour me changer avant de rentrer à la maison, me teindre les cheveux de la couleur qui me plaisait, mais acheter ensuite un bonnet pour les couvrir pour que ma famille ou des intimidateurs n’y voient rien, ou appeler des chauffeurs Uber pour me conduire à des endroits sûrs, plutôt que de prendre les transports en commun, pour éviter que des personnes susceptibles d’être mal à l’aise face à mon moi authentique ne me reconnaissent… Mes recettes de jeunesse, au propre comme au figuré, étaient le résultat de mes efforts pour me faire accepter et trouver une protection dans un monde où je me sentais seul et peu en sécurité. »Taur Veerapen (il/lui), gestionnaire, Médias sociaux à Mydoh

LGBTQ woman with short pink hair wearing white jacket holding laptop in the workplace

4. La discrimination en milieu de travail

Vous rappelez-vous la discrimination dont nous parlions ? Eh bien, elle se manifeste au travail et peut frapper les personnes 2ELGBTQI+ dès leur tout premier emploi et les suivre tout au long de leur carrière. Les occasions manquées et les pertes de revenus peuvent véritablement s’accumuler tout au long de la vie.

Dans un article de BBC News, des chercheurs exposent les conclusions provisoires d’une étude sur les revenus et la santé mentale des jeunes adultes issus de minorités sexuelles et de genres aux États-Unis. Les constats sont décourageants. « Dix ans après l’obtention de leur diplôme, les travailleurs américains ayant un niveau d’études postsecondaire s’identifiant comme LGBTQ+ gagnent 22 % de moins que leurs homologues hétérosexuels cisgenres », peut-on lire dans l’article. Une étude canadienne confirme l’existence de « disparités de revenus substantielles entre les lesbiennes, gais et bisexuels canadiens et les personnes hétérosexuelles ». Même de petits écarts de salaire peuvent finir par représenter beaucoup sur l’ensemble d’une carrière.Les revenus potentiels ne sont toutefois qu’un aspect du problème. Les chercheurs ont aussi découvert des préjugés homophobes qui se traduisent par des entretiens d’embauche ou des emplois moins fréquents pour les personnes queers et trans. Ils font état d’une ségrégation professionnelle, qui se définit par la sous-représentation ou la surreprésentation d’un groupe démographique dans une catégorie d’emploi donnée. Cela peut conduire à une relégation des personnes 2ELGBTQI+ à des professions moins bien rémunérées ou à une dévalorisation des professions comptant une forte proportion de personnes queers. Et lorsqu’elles obtiennent un emploi, ces personnes font face, sur le lieu de travail, à du harcèlement, à des préjugés et au refus d’occasions, comme des augmentations ou des promotions.

La discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre est illégale au Canada, et ces caractères sont protégés par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Comprenez bien vos droits, et, si vous êtes la cible de discrimination dans votre milieu de travail, demandez de l’aide à votre supérieur, au service des ressources humaines, à votre syndicat ou à un tiers.

J’aurais aimé savoir…

« En tant que personne LGBTQ+ travaillant dans le secteur des services, je me suis aperçu que je modifiais régulièrement ma personnalité pour m’adapter à la clientèle hétérosexuelle que je servais. Je pouvais abaisser le ton de ma voix pour sembler plus masculin ou rire à des plaisanteries que je ne comprenais pas ou ne trouvais pas drôles. Je le faisais consciemment, car je savais que certains de ces clients pourraient ne pas aimer être servis par un homosexuel.

Il était crucial de prendre un masque d’hétérosexuel, car, en tant que serveur, on dépend des pourboires pour payer ses factures et vivre. Le système des pourboires donne beaucoup de pouvoir au client, et je savais que, si mon orientation sexuelle déplaisait à quelqu’un, je risquais de voir certains clients ne pas me laisser de pourboire. Avec des commentaires du genre “les gars comme toi ne sont pas dignes de servir des hommes comme moi”. Ou des remarques carrément homophobes visant uniquement à me déstabiliser. Il était donc vital de dissimuler ma nature pour réussir dans mon domaine.

Plus tard dans ma carrière de serveur, j’ai trouvé du travail dans un quartier réputé accueillant pour les gais, où j’ai pu être davantage moi-même et me sentir globalement plus à l’aise. »Michael Jenkins (il/lui), associé, RBCx

Smiling Asian teen girl holding Pride flag above her head

5. Déménager dans un lieu inclusif

De nombreux jeunes 2ELGBTQI+ rêvent de déménager vers une grande ville pour y trouver de l’acceptation et une communauté. C’est compréhensible. L’inclusion sociale est un des principaux piliers d’une bonne santé mentale. Selon Statistique Canada, la moitié des personnes 2ELGBTQI+ au Canada se concentre dans quatre villes : Toronto, Montréal, Vancouver et Ottawa.

Mais déménager coûte cher. Les propriétaires exigent généralement le premier et le dernier mois de loyer, et parfois même un dépôt de sécurité. Cela peut finir par représenter beaucoup dans les grandes villes, où les loyers atteignent des sommets sans précédent. Un appartement d’une chambre à Toronto ou à Vancouver, par exemple, coûte quelque chose comme 2 500 $, et on peut s’attendre à payer au moins 1 000 $ si on y vit en colocation.

Après avoir trouvé un toit, il faut encore louer un camion de déménagement, en payer le carburant et souscrire une assurance habitation. Il est sage de prévoir un budget pour les meubles et les articles ménagers que l’on n’a pas déjà, sans oublier les frais d’installation ou d’ouverture de compte que facturent la plupart des sociétés de services publics, comme Hydro et les fournisseurs d’accès à Internet. Il est possible d’économiser en s’installant près d’un collège ou d’une université, où les logements en colocation sont parmi les moins chers et où de nombreux restaurants et entreprises offrent des aubaines ou des prix réduits. On peut aussi repérer les friperies à proximité et utiliser les places de marché en ligne pour acheter des meubles ou de l’équipement ménager.

J’aurais aimé savoir…

« J’ai eu la chance de grandir à Toronto et même de connaître le village gai lorsque j’étais enfant, car ma tante y vivait, ce quartier étant potentiellement très sûr pour une femme seule. Déménager d’une petite ville vers un grand centre peut être dépaysant pour n’importe qui – en l’occurrence pour des personnes queers quittant un milieu familial éventuellement hostile. Heureusement, il existe aussi des communautés queers dans de nombreuses petites villes, ce qui peut éviter d’avoir à déménager dans un grand centre urbain . »Michael Herrera (il/lui), vice-président principal et chef des finances au collège George Brown

6. Une difficulté accrue à épargner pour des projets

Un des problèmes à long terme découlant des disparités de revenus entre les Canadiens 2ELGBTQI+ et leurs homologues hétérosexuels est une certaine incapacité à épargner suffisamment pour des objectifs futurs, comme l’achat d’une maison, des placements, la poursuite des études ou la retraite.

Les perspectives financières sont particulièrement préoccupantes pour les personnes trans. Comme le souligne l’ACSM, une étude ontarienne a révélé que la moitié des personnes trans disposent de moins de 15 000 $ par an pour vivre. En comparaison, le revenu individuel médian des Canadiens était de 24 900 $ en 2008, lorsque l’étude a été publiée. Pour en savoir plus : Sachez être un allié pour votre enfant 2ELGBTQ+ (en anglais).

Comment l’éducation financière peut-elle aider les ados queers ?

À l’instar de la lecture, de l’écriture et de l’arithmétique, l’éducation financière  est un outil fondamental. Des enfants issus de communautés marginalisées, telles les personnes 2ELGBTQI+, qui comprennent le système dans lequel ils vivent seront mieux à même de se protéger de la discrimination, de demander des comptes à leur employeur et à leurs collègues et de prendre des décisions financières judicieuses pour aujourd’hui comme pour demain.

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* 2ELGBTQI+ est un sigle désignant les personnes s’identifiant comme bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, intersexuelles, queers ou ayant une autre identité de sexe ou de genre. Ce sigle est uniquement canadien et peut être compris comme remplaçant LGBT+.

Cet article ne contient que des renseignements généraux et ne constitue pas un conseil juridique, financier ou professionnel. Il convient de consulter un conseiller professionnel au sujet de votre situation particulière. Bien que les renseignements présentés soient considérés comme factuels et actuels, leur exactitude n’est pas garantie et ils ne doivent pas être perçus comme une analyse complète des sujets abordés. Toutes les opinions exprimées reflètent le jugement de l’auteur·e ou des auteur·e·s à la date de publication et sont susceptibles de changer. La Banque Royale du Canada et ses sociétés affiliées n’approuvent pas expressément ou implicitement les tiers ou leurs conseils, opinions, informations, produits ou services.

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